Pourquoi crier ?
Quand je vois ta vie se dérouler je me demande pourquoi « le cri » ? Elle est douceur cette nature du bord de l’eau, ce « Petit Lac », ce « Jardin avec maison rouge », cet Akabselvo ; quiétude ce « Fjord Tonsberg », ce « Pêcheur au bord de l’eau ».
Et puis ta peinture s’efface comme si tu avais passé un coup de chiffon, « Femme et enfant à Arendal », « Charlotte Dornberger », « Tête de fillette ».
Le désir ne serait-il pas pour toi ? Faut-il le rentrer comme ce soleil de Nice qui éclate sur la toile mais oblige à clore les paupières ? Tu cherches l’harmonie bleue et nous offre un éblouissant « Chapeau Rouge ».
Que veux-tu que je vois de cette peinture-Munch ? « L’amour, la jalousie la mort et la tristesse » pour reprendre les mots de Strinberg ? La Madone (1895-1902) immaculée entourée de spermatozoïdes ne pouvant percer l’hyménée ? Ou le fœtus-monstre placé à ses côtés : Munch-toi-même !
Ta vie s’écoule. Elle devient Obsession. Tu fais ce qu’il faut pour que jamais ta souffrance ne s’apaise. A la Table de Baccarat tu joues, tu te mets Sous le Joug. Tu voudrais mourir englouti pour ton amour : Vampire, Ensorcelé, gravures de voyeur (Attraction, Jalousie). Te fondre, disparaître dans sa chevelure. Tout pour un Baiser. La boisson. Tu bois : oublier ou te trouver ?
Alors tu te laisses aller. La couleur envahit ta palette. Partout, toujours ta peinture se fait « cri ». Tes ciels sont des tourments, comme cette Mère et Enfants, ces Baigneurs et Deux garçons sur la plage. Tes couples sont des « Solitaires ». Ils ne se touchent ni ne se baisent. Avec Tulla Laura, c’est l’Alpha et l’Omega.
Tu t’essaies à la société, Ouvriers dans la rue ou dans la neige. La scène de genre, Cheval au Galop, Route de Montagne, le Tronc Jaune, Baiser sur les cheveux. L’âge aidant tu t’assagis, galerie de portraits apaisants.
Mais tu as raison. C’est bien Munch qu’il faut aller voir. Tes autoportraits au Lit, à la Bouteille à la Grippe Espagnole. Ils disent tout de toi. Tu es séduisant.
Mauresk.