lundi 12 avril 2010

Munch toi-même

Pourquoi crier ?

Quand je vois ta vie se dérouler je me demande pourquoi « le cri » ? Elle est douceur cette nature du bord de l’eau, ce « Petit Lac », ce « Jardin avec maison rouge », cet Akabselvo ; quiétude ce « Fjord Tonsberg », ce « Pêcheur au bord de l’eau ».

Et puis ta peinture s’efface comme si tu avais passé un coup de chiffon, « Femme et enfant à Arendal », « Charlotte Dornberger », « Tête de fillette ».

Le désir ne serait-il pas pour toi ? Faut-il le rentrer comme ce soleil de Nice qui éclate sur la toile mais oblige à clore les paupières ? Tu cherches l’harmonie bleue et nous offre un éblouissant « Chapeau Rouge ».

Que veux-tu que je vois de cette peinture-Munch ? « L’amour, la jalousie la mort et la tristesse » pour reprendre les mots de Strinberg ? La Madone (1895-1902) immaculée entourée de spermatozoïdes ne pouvant percer l’hyménée ? Ou le fœtus-monstre placé à ses côtés : Munch-toi-même !

Ta vie s’écoule. Elle devient Obsession. Tu fais ce qu’il faut pour que jamais ta souffrance ne s’apaise. A la Table de Baccarat tu joues, tu te mets Sous le Joug. Tu voudrais mourir englouti pour ton amour : Vampire, Ensorcelé, gravures de voyeur (Attraction, Jalousie). Te fondre, disparaître dans sa chevelure. Tout pour un Baiser. La boisson. Tu bois : oublier ou te trouver ?

Alors tu te laisses aller. La couleur envahit ta palette. Partout, toujours ta peinture se fait « cri ». Tes ciels sont des tourments, comme cette Mère et Enfants, ces Baigneurs et Deux garçons sur la plage. Tes couples sont des « Solitaires ». Ils ne se touchent ni ne se baisent. Avec Tulla Laura, c’est l’Alpha et l’Omega.

Tu t’essaies à la société, Ouvriers dans la rue ou dans la neige. La scène de genre, Cheval au Galop, Route de Montagne, le Tronc Jaune, Baiser sur les cheveux. L’âge aidant tu t’assagis, galerie de portraits apaisants.

Mais tu as raison. C’est bien Munch qu’il faut aller voir. Tes autoportraits au Lit, à la Bouteille à la Grippe Espagnole. Ils disent tout de toi. Tu es séduisant.

Mauresk.

Anne Mahey Quintette

Concert « La cellière ».

Il y a une maison calme posée au sommet d’un mont, un abri, une cellière ; là repose le bon vin ; on y marine en sourdine une cuisine nouvelle, des saveurs de soleil couchant.

Dans la salle un Erard aux touches d’ivoire, couchée une contrebasse aux vernis sombres comme une eau noire et puis scintillants, par-ci par-là, une batterie avec ses cymbales, ses chromes ses reflets d’argent, des saxo, des flûtes à bec ou traversière.

On s’active doucement : c’est le temps des rencontres, des retrouvailles, des poignées de mains, des poitrines qu’on serre, des paroles anciennes. Est-il possible, depuis quand et pourtant sourires et nouvelles compositions.

Il faut s’accorder. La voix d’Anne perce le silence : ses nouveaux morceaux, ses amis musiciens, un quintette devenu sextette. Une Première ou plutôt une avant-première. Bientôt Grenoble et le festival…

La musique alors, la contrebasse d’abord. Un monologue ou une histoire. Une entrée en matière pour engager le poème, une discussion à deux, à trois, bien plus ensuite. Pépiements d’oiseaux deviennent vacarme. On tonitrue.

Au fur et à mesure, la conversation s’anime, devient-elle dispute, combat, guerre des instruments…Ou bien, s’agit-il d’une symphonie, une harmonie des contraires… On se répond, on se respecte ; on se défend mais on n’empiète pas !

Moments-clés-phares-éblouissements : les improvisations. Emportements du sax de Gaby Schenke, lamento douloureux de la clarinette basse de Jean-Pierre Sarzier. Mais que dire du batteur Erwan Bonin « épatant épaté », qui pince sa cithare, caresse sa caisse et sa cymbale, déchire l’air avec du papier froissé. Du piano, soutien constant et partant, se lâchant pour nous mener loin vers un monde inconnu.

Faut-il s’étonner alors de ce chant venu de quelques coins d’Afrique, langue Bushman ou Pygmée, sortie par effraction de la forêt équatoriale ? Musique-salutation, « bol cassé » peut-être mais jamais fracassé, Elle coule douce comme une fontaine nouvelle.
Un travail d’orfèvre, de la « Musique française », Madame !

Mauresk


Gaby schenke: sax
Patrice Hibon: piano
Jean Pierre Sarzier: clarinette basse plus clarinette bambou
Erwan Bonin: batterie
Jean Philippe Seunevel: voix
Anne Mahey : contrebasse
Quintette Anne Mahey + Un.