mardi 28 décembre 2010

la fontaine enchantée

La Fontaine Enchantée.

F.H.S, technique mixte 2010

cerisier, gaines diverses, fils électriques, câbles numériques, isolants, téléphone portable, sac, torchon, ballon, ordinateur portable, tuyau d'arrosage, pomme d'arrosage, taille-haie, mât d'antenne TV, bouchon de bombe aérosol...

Mauresk : _ comment vous est venue l’idée de cette fontaine ?

F.H.S :_ c’est venu petit à petit.

M. : _ comment ça ?

F. :_ je voulais débarrasser la cave de tout un ensemble de matériaux entassés-accumulés là depuis des années.

M. : mais pourquoi la fontaine enchantée ?

F. : _ au départ, il n’y avait pas de fontaine. Juste un cerisier qui avait donné pendant des années une profusion de fruits et qui était mort l’année précédente. Il avait été décapité pour éviter que les branches mortes ne tombent malencontreusement sur quelqu’un. Et il ne restait donc que la base du tronc et je m’étais dit que je pourrais sculpter dedans un bouddha.

M. : _ un Bouddha ? Pourquoi un Bouddha ?

F. : _ je ne sais pas très bien mais j’avais fait sculpter un bouddha en bois à Katmandou par des sculpteurs Nawars et j’ai logé à Katmandou dans un hôtel dont le jardin était décoré de divers motifs bouddhistes qui m’avaient beaucoup plu.

Et puis, l’art est fait d’un concours de circonstances dans lequel jouent beaucoup l’environnement et les matériaux à disposition. Si bien que l’art devient un dispositif scénique de mises en forme d’éléments divers empruntés à toutes les sphères de l’existence.

M. :_ que voulez-vous dire par là ?

F. : _ rien d’extraordinaire. Simplement que l’art est une interprétation du monde qui mêle des moyens de divers ordre : la « cosa mentale » de Vinci sans doute mais aussi les événements qui nous entourent, les moyens pratiques que notre histoire nous a donné la possibilité de nous approprier plus ou moins bien.

M. :_ pourquoi avoir renoncé au Bouddha ?

F. : _ je n’y ai pas renoncé. Le Bouddha est là sous la sculpture sur le bois de cerisier. Je l’ai peint en 2009 avec la perspective de le sculpter plus tard. Une fois acquises les techniques pour le faire proprement. Un peu comme pour « Laure Manaudou »…

M. :_ « Laure Manaudou » ?

F. :_ oui ! dans l’autre partie du jardin j’ai proposé une sculpture de « Laure » : la « Laure » de Pétrarque bien sûr mais qui prend la forme physique de notre Laure à nous médiatisée sous la forme d’une nageuse. Ma « Laure » est une branche du cerisier qui plonge dans un miroir. Ma sculpture encore une fois est peinte. En attendant de la sculpter, je l’ai proposée à un sculpteur des Beaux-Arts mais cette « idée » de Laure ne lui a pas plu et il a commencé des études de médecine depuis…

M . : vous ne sculptez donc pas ?

F. :_ je sais que sculpter le bois est très « dur » et je n’ai pas beaucoup de temps…le temps me presse tout le temps. Donc, je « sculpte » mentalement et donne une esquisse de sculpture grâce à la peinture.

M. :_ mais revenons à la fontaine… vous m’avez dit qu’au départ ce n’était pas une fontaine mais un Bouddha…comment est-ce venu alors ?

F. : le matériau m’a guidé : toutes ces chutes de « travaux » réalisés dans la maison pour la mettre au goût du jour et qu’on ne voit pas parce que enterrés, encastrés, recouverts de baguettes ou de plâtre. Je les ai littéralement entassés sur le tronc de cerisier. Avec sans doute une idée de forme déjà dans la tête…l’occasion aussi puisqu’il était question d’un mariage…que des artistes refaisaient le décor intérieur d’un salon « en même temps ».

M. : et pourquoi « enchantée » ?

F. : là aussi le titre a précédé la réalisation. Et la réalisation a précédé le baptême. Les deux choses n’avaient rien à voir l’une avec l’autre. Je signais depuis quelques temps des courriers L.F.E : La Fontaine Enchantée… la maison est située rue Lafontaine…et la sculpture s’est d’abord, et s’appelle toujours « les mariés ».

M. :_ les « mariés » ?

F. :_ une protubérance du tronc du cerisier qui devait d’abord donner un peu de ventre à Bouddha ou du moins des rondeurs, m’a ensuite fait penser au « ballon » d’une femme enceinte. Or, la mariée attendait un enfant…et donc progressivement je suis passée à la « mariée » puis par progression successive de la sculpture à une « fusion » et à une « confusion » et donc aux « mariés ».

M. : comment en êtes-vous arrivé à « la fontaine enchantée » ?

F. : depuis quelques temps des maisons du quartier ont changé de propriétaires et toutes sortes d’objets sont mis sur le trottoir…et un jour j’ai trouvé un gros tuyau d’arrosage…que j’ai hésité à ramasser car j’ai tendance à accumuler beaucoup de « poubelles » depuis toujours…et puis de fil en aiguille (c’est le cas de le dire !) j’ai entouré mes mariés d’un tuyau d’arrosage, je l’ai enfilé dans un mât d’antennes de TV et j’ai posé une « pomme » d’arrosage de jardin.

M. : _ la pomme du péché originel ?

F. :_ au départ non, un sculpteur ne sait pas ce qu’il fait mais maintenant on peut dire oui. On peut tenir tous les discours que l’on veut une fois la sculpture terminée.

M. : _ vous savez que « la fontaine » n’est pas un titre anodin pour une sculpture.

F.H.S. : _ bien sûr… mais dans ma tête c’est un peu confus…l’eau, la source c’est l’origine plus que le sexe. Mais il est vrai que « à la claire fontaine allons nous promener »… Et puis ce matin, je viens de lire le livre de B. Marcadé « Marcel Duchamp » et l’histoire de « the fountain » a beaucoup de similitude avec la mienne…sauf que ma fontaine est « enchantée »… et avec ce Bouddha en-dessous certains ne manqueront pas de dire que je renoue avec le sacré… alors qu’en réalité tout est déconnecté.

M. : _ quelles similitudes trouvez-vous entre les deux fontaines ?

F. :_ les matériaux en dépit de leurs différences ; des matériaux qu’on ne considère généralement pas comme « artistiques ». Pour Duchamp la symbolique est forte : un « urinoir » mais celle de mes mariés-fontaine aussi : tous ces câbles, tuyaux, fils électriques, gaines… sont symboliques de toute notre « tuyauterie intérieure », mais aussi « des fluides » qui caractérisent notre société de la communication, de la pollution plastique aux deux sens du terme... On pourrait dire que les hommages sont multiples : le taille-haies métaphorisé en tête et mâchoire fait évidemment allusion à Picasso…

J’ai retrouvé dans le livre de Marcadé tout un ensemble de « désirs » manifestés par Duchamp qui sont synthétisés dans « la fontaine enchantée ». Ainsi, Marcadé rappelle la volonté de Duchamp de faire intervenir « les éléments » dans ses œuvres : le vent, l’air qui conduit d’ailleurs à la destruction de l’œuvre…c’est un peu le cas de ma fontaine dont les « cheveux-sacs-de-pommes-de-terre » volent au vent et dont l’ensemble est soumis aux intempéries.

Marcadé rappelle que « the fountain » a été aussi appelée « Bouddha » : c’est curieux non ?

Mauresk : et pourtant tout cela est le fruit du hasard, non ?

F.H.S. : un hasard fruit de cerveaux interconnectés et soumis à la main qui l’organise, non ?

Mauresk.

lundi 20 décembre 2010

« Que quoi ? » (suite) : description.

Guillaume Lebelle, Ralph Ribour : technique mixte, 2010.

Cadre pièce (5,00 X 3,94 X 2,91), plafond « à la française » à caissons décorés de papier peint « fin de siècle » (XIXème ?), style : « chinoiseries » dragons, monstres… parquet « Versailles » « authentique » : provenance du château ?, cheminée marbre à manteau décoré de deux naïades à queues de sirènes et bandeau orné d’une tête de léopard, surmontée d’un trumeau décoré de guirlandes de bois sculpté avec nœud (kitch) plus fausse fenêtre à carreaux de vitrail, murs à lambris « vert d’eau » avec panneaux blancs cadres dorés, deux portes doubles dont une avec miroirs entrants et l’autre miroirs sortants, poignées rondes de porcelaine, surmontées de têtes de nymphes (Flore) coiffées de tiares « clef de sol » et chevelures-nattes mêlées de fruits de « toutes sortes », plus une porte simple sculptée poignée de bronze « Napoléon III », baie de vitrail (par moitié)néo-gothique avec ogives, Fleurs de Lys et Croix de Saint-André, pourpre, or et « vert d’eau », plomb ciselé, chute de verre signé d’un poinçon Franc-maçon (S . : S . :) Frère Trois Points.

Vues sur rampe de balcon fleurdelisée et jardin « Moyen-âge » à l’Est, entrée style « Grenade » « néo-mauresque » au Sud, « Atelier d’artiste » « néo-gothique-néo-mauresque » toile F.H.S. « Le Sauvage » dit aussi « le barbare (hommage à Ivan Halimi) »(2006 ?) + « Déconstruction (Le Sauvage ) » par Lebelle (2008) (annotée au dos « prêt à F. Faugeron jusqu’en 2012 ») + Trois « Hercule et lion de Némée » (moulages en terre de X. par F.H.S. (2010), piano quart-de-queue Pleyel (1923 signé), autres meubles et objets dont « Zorro » de R. Ribour (gouache, 2010) à l’Ouest. Lingerie au Nord (diverses machines, marques indifférentes, table à repasser façon Beaux-arts, readymade).

Sur : _ Panneau Nord : Porte simple surmontée du « chiffre » du Propriétaire « F » de Fouquet pour F.F. avec photo numérique de F.F. par Verluise (Théâtre royal de Fontainebleau, 2010) (Samsung D60, tirage sur HP C3180, cartouches épuisées) (retouches R.Ribour « style momie égyptienne » avec serpent en bois de cagette peint (en partie), blanc de titane, et rehauts de fusain Lebelle, fixatif ( ?). Le tout « recomposé-décomposé ».

Porte : décor simple. Arabesques « non-arabe », brisures de miroir, collées « fléchissant », dorures F.H.S. « sur et sous » blanc « fond de teint ».

Trumeau : simple de Simples (style Cocteau (Chapelle de Milly-la-Forêt)) bleu Bourbon. Sculpture « aérienne », « flambée de découpes de cagettes (Les Halles) » bleutées (légèrement). Avec : miroir réfléchissant double selon angle et lumière du Sud complexe (style « Opticks » (1704) de Newton). Nuages et volutes alternativement bleuis, blanchis et noircis. Carreaux de planchettes de cagettes, idem (R.Ribour ).

Manteau blanchi « par erreur » (White Spirit : « Blanc d’Esprit ») (F.H.S 200?) et reblanchi «à chaud » « avec bonheur » par Lebelle. Rajouts F.H.S. : Sacrum de Sagone, Os de Seiche du Liamone (« l’arbre aux trois os »), Bois flottés du grau du Liamone (le tout faisant sculpture (non signée- F.H.S), copie du « Baiser de Rodin » en « résine de savon » teintée « façon acajou »), mariés en polyuréthane (pièce montée pâtissier renommé d’Orsay), « l’Argent » : cadre doré (solde Nobilis), clochette de salle-à-manger en bronze, convertisseur TV HD-numérique. Sur le devant deux sculptures : Nus du Bénin (don D. Miscopein), faisant pendant les Naïades (XVIIIème S.) le tout entouré de dorures diverses (F.H.S.).

Colonne droite : idem gauche (non décrite) + petite peinture Lebelle gondolée (Venise). Rehauts de cagette bleuissante (Ribour).

Panneau droit : divers collages (ou plutôt « original » agrafages (agrafes marque inconnue)). Carrés du Louvre ( ?) ou du « Loup » ! Graphismes, graphes et agrafages graves… fusains (supposés Lebelle), influences diverses dont Vinci, Eiffel, Michaux, -dière) : pointillisme, tachisme, « dripping » (non sure). R. Ribour « à la manœuvre » : échelle et « courte-échelle » ! Vert « green », orange « orange ». Divers fusains sur basalte de cagette (« cheap »). Sculpture bois décalée, agrafée. Restauration (juin 2010, œuvre en cours), clouée, F.H.S..

_ Panneau Est : en fonction de la saison : nord-est/est/sud-est. Sur noisetiers, façon Monet (saule-pleureur). Plein-Soleil. Ou, lumière froide de soleil couchant.

Gauche. Faux marouflage de fusain : Mondrian Noir. Marouflage de cagette(s, peut-être) : Vrai. Lune, quartiers d’hiver. Rattrapages angles morts. Lebelle et Ribour total. Pas de F.H.S.. Au plafond, spot orange-fluo blanchi « à la moelle ». Au sol, éclairage F.H.S. bleu « Castorama »-marocain. Poste de TV (mire blanc-noir en harmonie/ bleue disharmonie). New Age.

Droit. Grisaille. Ou lavis. Estampe chinoise ou japonaise (plutôt chinoise !). Tête de loup. Noir de fumée. Encadrement dorure par intervalle blanchie (dominante or). Sur les côtés, marouflage sporadique…rappels de vitrail : faux pourpre, faux Bleu de France (qualité de gouache inconnue mais raffinée). Devant : « œil de bœuf » façon Lebelle (F.H.S.) : sur drap, impression d’oiseaux-mouches (temps des amours) becquetants et « vibrillants ») sur chevalet années 70 en hêtre massif.

Au centre. A travers la vitre estampillée S :. (deux fois), rampe blanche avec rehauts de peinture jaune sur Fleurs de Lys.

_ Panneau Sud : à gauche, authentique- faux- marouflage de lavis-estampe chinoise : paysage d’eau ou d’air ou oiseaux: fusain « à la main ». Rien à dire. Poésie. Double ou copie (presque) : G. Lebelle, 2008-2010, « En même temps » (Galerie Hus) : « je m’enfonce », « je coule », « je vole ».

Double porte : Marouflage de contre-plaqués (vissage sur portes miroitées (R.Ribour)). « Succès ». Esquisses de lavis ou de gouaches bleues et blanches et noires et vertes et de contre-plaqué. « Exceptionnel ». Adam et Eve. Sodome et Gomorrhe (Hommage à Dürer). « Emotions».

En contre-champ, « l’homme à la bicyclette » (F.H.S.) : « qu’est-ce que ça fait là ? ». Au-dessus, Flore « à la tiare et aux fruits ». Os de seiche (du Liamone) (Ribour, rehaut de fusain (Lebelle ( ?))). Rajouts : portraits des peintres-sculpteurs par F.H.S. : effet de miroir : « Les Ménines », Vélasquez ( photos numériques Samsung (idem), tirage HP, cartouches correctes) ; rejets de cagettes bleutées, blanchies, noircies. (F.H.S.) (Phraseur).

A droite : méli-mélo. Composition mixte : cagette, repeints, faux-miroirs, posidonie « écrasée », fusains, pastels et aquarelle (peut-être). Dessous : chaise de jardin en alu-peint-blanc avec posé dessus un Canson vert-green taché de blanc… (rajout-pas-rajout de F.H.S.). Radiateur de fonte avec brillances diverses.

_ Panneau-Nord : Au nord-haut craies de couleurs diverses pour identification (provisoire et à effacer (éventuellement) : « fgr » (F.H.S.)). Au nord-centre, cinq plaques d’aciers clouées (diversement). Stries de scie circulaire. Tendance faux-miroirs. Rehauts d’huiles, noir de fumée, verts « green », jaunes... Reflets. Miroirs (vrais). Intercalés : papiers orange fluo, rehauts de blanc.

« Déroute ». Ou « Eaux ». Ou « Abymes » ?

Dessous : dessus radiateur de fonte années 20, lampe de labo-photo début de siècle ( XXème, arrière grand-père Gabuet), éclairage rouge, sculpture : bois flotté et 3 posidonies (F.H.S.), dessous collage divers (GL et RR), accroché au radiateur, sac orange fluo (Colours of Beneton).

Au noroit, crochet X, fleur séchée (« p’tite fleur aimée »). « La grossesse » dans cadre doré (soldes Nobilis). Brisures de miroirs. Dessous, posé sur le parquet : « œil de bœuf » (sur drap (façon Lebelle): « Sterns au-dessus de l’Arctique » (« toile » : F.H.S. (2010)). Non loin flambeau Art Nouveau (provenance Bourg-la-Reine, sans prétention).

Encore plus noroit, double porte miroitée (miroirs 2000). Divers fusains et papiers orangés blanchis plus ou moins glissés sur les glaces. Bas de portes : fusains de R.Ribour (Les jumeaux) agrandis (A3) et photocopiés sur Rank Xerox, collés (colle à bois). Dans l’encadrement, faux miroirs en carrés de papier argent tenus par des tasseaux de cagettes peints. Au-dessus « Flore à la tiare et aux fruits… » (rajouts).

Abondance.

Œuvre inachevée.

Rajouts F.H.S. 2010. Mauresk.

samedi 11 décembre 2010

Que quoi ?

En banlieue vient d’ouvrir une exposition intitulée : « Que quoi ? » _ Titre étrange ! S’il en est !

Quelles circonstances pour telle question ? Naturellement, nous disjonctons !

Quels événements devancent tel énoncé ? Comment répondre à la question ? Ensemble vide ou ensemble plein ?

Ensemble vaste, infini, dit-on ! Qu’un résumé falsifie tout. Réduire l’ensemble aux éléments ?

A la gageure, nous répondons : « quelques éléments ? En quelque-sorte échantillon, sondage, panel ! » Voilà la méthode ! la bonne : résumer ladite idée énoncée par ledit ensemble !

S’impose ici la statistique. Avec son arsenal de ratios : moyenne, écart-type, variance, espérance !

Le mot est lancé : Espérance. De quoi ou « que quoi ? ».

L’échantillon ne doit-il pas être représentatif de la réalité ? Ou n’est-il en réalité représentatif que d’une partie de la réalité ? Une réalité donc subjective, c’est-à-dire fonction du sujet qui propose cet échantillon.

Devant l’amas d’archives quoi ou « que quoi ? » traiter ? Comme l’historien : choisir, éliminer, censurer ou, au contraire mettre en avant, valoriser, énoncer vrai ou faux ( ?) avec force argumentation, problématisation, présentation des faits et logique déductive.

Le subjectivisme l’emporte-t-il toujours sur l’objectivisme ? L’époque, la psychologie, l’histoire, le point de vue… Et voilà notre peinture des mœurs, des normes et des valeurs obligée de repentirs !

Ethno-, anthropo-, ego- centrisme voilà les concepts à la mode. Ils sont choux avec leurs Mots, leurs Archives du Nord, leurs égo-histoires !

« Que quoi ? » appelle, dans ces conditions, une réponse plus simple, plus déterminée…même si la réponse à une telle question n’est pas fermée.

Celui qui y répond, peut mettre tout ce qu’il veut : c’est-à-dire de rien (l’ensemble vide) à l’infini sans craindre la critique.

C’est Lui qui délivre la réponse au « que quoi ? ». Et, personne n’a à y redire !

Mais, que voit-on dans l’exposition : « Que quoi ? » ?

Je ne sais pas s’il faut en dévoiler le contenu. La surprise ne serait-elle pas gâchée par des révélations, des descriptions ! Pourquoi pas non plus des photos ?

Est-on sûr qu’elles donneraient une juste idée du contenant et du contenu ?

Il existe cependant un bémol à toutes ces tergiversations. Il est en fait très difficile de voir l’exposition : « Que quoi ? » …la banlieue…des grilles, des horaires à coucher dehors, des chiens de garde, un loup-garou … Visiblement, il faut montrer patte blanche !

Mauresk

Guillaume Lebelle, « En même temps », Peintures 2008-2010, Galerie Hus, 4 rue Aristide Bruant, 75018 Paris.

vendredi 10 décembre 2010

En présence d’un clown, d’Ingmar Bergman (1997).

« Je coule ! » Exclamation terminale du film, En présence d’un clown, sorti d’abord en téléfilm en 1997, alors qu’Ingmar Bergman a renoncé au cinéma et se consacre au théâtre et à la TV.

De quel naufrage nous parle le grand cinéaste ? Le sien, le nôtre ? Celui du cinéma, de la civilisation ? « Tout est dans tout », pourrait-on dire. Et comme toujours, Ingmar Bergman mêle les histoires et l’Histoire. Il se raconte et nous raconte.

Des histoires individuelles, il y en a donc. Un ingénieur et un universitaire se rencontrent dans la chambre d’un hôpital psychiatrique. Des êtres intelligents mais déjà fous !

Et qui mettent en boîte tout le monde ; l’infirmière poursuivie par la lubricité de l’un, le médecin qui abandonne très vite le terrain…mais aussi nous, prêts à adhérer à leur fantasme de la vie et de leur rapport au monde.

Nous sommes en 1925, mais leur histoire est la nôtre. Ils veulent s’épater et épater le monde. Ils ont le projet de rendre le cinéma parlant, et se lancent dans l’aventure comme on part à la conquête de l’espace.

A leur projet adhèrent les enthousiastes, leurs femmes, des femmes et nous sommes transportés dans un chalet où ils projettent leurs fantasmes. Le film est le moyen qu’ils choisissent pour opérer des détours : draguer, être ou ne pas être.

Le public est là aussi : des notables, des voisins attirés comme des lucioles par ce feu intérieur qui brûle quelque-part. L’aventure tourne court. Le procédé est mis à mal par une technique explosive. Le projecteur s’enflamme et la salle aussi. Mais, pas d’affolement !

Nos aventuriers de l’Humanité ne se découragent pas et reprennent le thème du film au théâtre. Entre temps les acteurs changent mais le scénario reste le même.

De quoi s’agit-il au fait ? De l’histoire de Schubert frappé de maladie vénérienne et qui peu à peu sombre dans la folie.

Je coule oui, « je coule »… Mauresk

mardi 7 décembre 2010

qui a peur de virginia woolf ?

Qui a peur de Virginia Woolf ?

Virginia ou Woolf ? Qui est la Vierge, qui est le Loup ? Est-ce un traquenard ? Quelle Vierge est tombée dans la gueule de quel Loup?

Oui, c’est une fable que nous raconte Edward Albee dans « Qui a peur de Virginia Woolf ? » montée aux Gémeaux par Dominique Pitoiset. La fable du Loup et de la Vierge, dans laquelle nous ne savons pas bien qui est le Loup et qui est la Vierge.

Nick et Honey, un jeune couple récemment arrivé sur le campus d’une université du Middlewest, sont reçus chez Martha et George à deux heures du matin après une soirée déjà bien arrosée. Les deux hommes sont enseignants et ou chercheurs.

Un jeu de rôles se met progressivement en place entre les quatre acteurs, véritable quête de la Vérité de chaque être. Comme chez Pirandello, ces jeux successifs permettent, peu à peu, de révéler les buts, les désirs et les moyens utilisés par chacun pour parvenir à ses fins.

Le jeu de rôles permet des coups de théâtre et de renverser les situations. Celui qui apparaît le plus fort dans certaines circonstances se révèle d’une faiblesse et d’une fragilité extrême dans d’autres.

Martha et George mènent la danse visiblement. Ils ont des « heures de vol » derrière eux, et ne peuvent plus faire l’impasse de leurs impasses. Mais Nick et Honey, sous l’apparente naïveté des débutants, sont très vite confrontés à leur propre histoire et ne peuvent y échapper.

A quatre, à trois ou à deux, les scènes se succèdent et, par petites touches, mettent au jour les dits et les non-dits du parcours de chacun. Avec au cœur de la question : la rencontre, le mariage, la procréation.

Si Martha semble la plus cynique et George un professionnel raté, Nick un biologiste plein d’allant et Honey une souris naïve, peu à peu, chacun apparaît sous son vrai visage : Honey vomit sa vie, Nick un être ambitieux sans scrupule, George un être lucide et désabusé, Martha une femme meurtrie.

La pièce, très enlevée, grâce à une mise en scène très réussie de Dominique Pitoiset, est un bijou d’échanges croisés au rythme haletant.

Mauresk

lundi 6 décembre 2010

Sex-voto : tache et chatte à la tâche.

Il me semble qu’il s’appelle Stef. Il pousse un diable. Et je lui demande : « qu’est-ce que tu transportes ? ». _ « mon âme » me répond-il.

Au-dessus de lui une grande flèche rouge-sang indique la direction à suivre. Sous la flèche, une pancarte indique : « sex-voto ».

Un escalier en colimaçon mène comme à un gouffre masqué par la forme d’un escalier de cave. Je descends guidé par Cédric. Il ne tient pas la chandelle mais c’est tout comme.

Au fur et à mesure que nous descendons la lumière se tamise. Sans doute est-elle électrique. Mais pour le moment c’est moi qui le suis.

Dans la crypte tout est blanc. Le « sex-voto » est placé sous le signe de l’Immaculée Conception visiblement. Ma vue se brouille. Est-ce sous l’effet des lumières vacillantes ou sous l’emprise des mélanges qui m’ont mené de Burdeau en Leynaud et de Leynaud aux Capucins ?

Un ex-voto est une offrande (tableau, statuette, plaque gravée…) faite en reconnaissance d’un vœu, ou selon un second sens : au gré de ses désirs. Il y a donc ambiguïté : ou bien il s’agit de remercier pour le vœu exaucé, ou bien il s’agit de prier pour que le vœu soit exaucé.

« Sex-voto » serait donc : « merci pour le sexe » ou « merci de me donner du sexe » !?.

En tous les cas, il s’agit de parler sexe. Ce n’est pas nouveau et ça se fait depuis longtemps. Mais, cela justifie-t-il un ex-voto ? Pardon, un « sex-voto » ?

Les adolescents d’aujourd’hui comme les hippies d’hier aiment arborer sur leur tee-shirt : YONI ou IONY. Le O est le plus souvent remplacé par un cœur.

Ce qui fait : « I love New-York ». Mais combien savent qu’ils arborent en fait le nom du sexe féminin en hindou : YONI ou IONY? S’agit-il d’un « Sex-voto » mondialisé ?

Il en existe toute une déclinaison désormais : I love ... Paris, London, Roma, Berlin, Tokyo etc…ce qui évidemment brouille les sens…

Au cimetière de Pashupatinath à Katmandou, des dizaines de chapelles alignées le long de la rivière sacrée Bagmati contiennent autant de LINGAM démesurés enserrés dans les YONI correspondants. Le LINGAM est le sexe mâle. S’agit-il de « sexs-votos» hindous ?

Pourquoi tourner autour du pot ? Le sexe nous obsède et toutes les sociétés l’ont magnifié ou l’ont banni. Ou l’ont magnifié pour le bannir…

Une récente exposition au musée des Arts Premiers nous a montré une vision ludique de la sexualité chez les Mochicas qui aimaient disposer dans leurs tombes des objets dotés de beaux phallus et des accouplements heureux.

Le bouddhisme tantrique a une perception plus explosive de la sexualité mais le Kama Soutra voisin est d’un érotisme raffiné. Songeons aussi aux Shunga japonais chargés de porter bonheur aux guerriers ou d’éduquer les jeunes filles…

Dans l’occident chrétien, la défense des « valeurs familiales» de la Contre-Réforme à G.W.Bush ou à Sarah Palin fait du sexe un objet de contrition. N’est-il pas le péché originel ?

Mais pas à toutes les époques ! Les « sexs-votos » de Michel-Ange sont en « chair et en os » si je puis dire. Il est vrai, vite recouverts de feuilles de vigne. Mais ne vient-on pas de les nettoyer ?

Nos artistes de l’Atelier L’attache à Lyon ont-ils renouvelé la performance ? Remercient-ils ou prient-ils ?


Les deux me semble-t-il.

Dans la crypte « sans tache », on célèbre dans un coin les noces de Ken et Barbie sous force voilure de crêpe blanc et dans une lumière éthérée. A côté, un os pénien est l’objet de toutes les attentions : le prie-t-on ?

Tandis que Cédric (qui toujours m’accompagne dans cette Visitation New Age), m’explique que son installation évoque l’apprentissage heureux d’une sexualité d’adulescent qui n'était pas à la tâche...

Un matelas blanc portant la marque d’un corps transpirant(ou peut-être, l’ombre spectrale du corps souffrant dans le monde des ombres) est posé sur des pis gonflés d’air (blanc immaculé aussi) qui m’évoquent des poupées gonflables, la gonflette du jeune mâle ou des capotes dézinguées.

Suis-je sous l’emprise d’un stupéfiant ?

Au mur, suspendus tels des "ex-votos du sex-voto", une courgette « ne me suffit plus » (peinte en blanc) et des cassettes-VHS-cul(tes) de l’apprentissage de la sexualité (elles aussi blanches).

Les kleenex (usagés) et l’oreiller (en plumes véritables) posés sur le matelas sont les objets nécessaires à l’évocation de l’onanisme, la sublimation et la masturbation. L’oreiller étant (« c’est bien connu !») l’objet transitionnel par excellence !

Au pied du lit (sans pieds), une TV dévide, en continu, deux heures de film porno (en boucle). Les manipulations sexuelles se faisant avec des gants en latex. Est-ce parce que le sexe est redoutable ou à redouter ?

Sans doute les sexs-votos sont aussi là pour conjurer maladies vénériennes, syndromes de Kaposi et SIDA.


Pas de sex-voto de chatte à l’Attache cependant.

Mauresk.

Atelier L’attache, 7 rue des Capucins, 69001 Lyon.

jeudi 2 décembre 2010

Eugène Leroy.

Peintre ou sculpteur ? Des croûtes ou des bas-reliefs ? Des roches ou des eaux profondes ? Abstrait ou figuratif ? Des couleurs ou la négation de la couleur ?

Des ombres et de la lumière. Le message d’Eugène Leroy nous échappe. Sûrement un peintre torturé ! Il paraît que non.

Et pourtant quelle violence dans cet éclatement des tubes de peinture sur la toile dans un enchevêtrement d’épaisseurs. Renouvèle-t-il la peinture au couteau ? Il écrase, il grave sa peinture plus qu’il ne la lisse.

La croûte ! Terme péjoratif par excellence, pour les amateurs de peinture et souvent un public non averti, désigne quelque-chose de grossier, de pas léché (au propre comme au figuré).

La belle peinture n’est-elle pas lisse, sans aspérité. Une technique d’abord avant que d’être un art ? Et sans doute E. Leroy y-a-t-il prétendu un jour comme tout peintre en herbe.

Cette peinture est donc un aboutissement. Le résultat de mutations, de digestions, une régurgitation. N’est-ce pas l’effet voulu d’ailleurs ? Des gris, des bruns, des blancs avec quelques pointes de couleurs enfoncées dans ce magma informe, une vomissure, un dégueulis.

Leroy n’a pu échapper à la problématique de son époque, à la Tragédie ! Elle est là, elle déborde. Elle coule comme une lave visqueuse, ces laves cordées que déglutissent les volcans. C’est le résultat de l’explosion, de la fournaise.

La fournaise ? On en perçoit le fond chaud et brûlant ! Un sexe, une fente, une bouche béante ! Une rougeur, un feu sacré ? Un corps ? Un nu ? Oui tout est là !

Au fond de l’enfer, il fait chaud. Alors, faut-il y aller ?

Mauresk.

Eugène Leroy à la Galerie de France jusqu’au 4 décembre

Ça sert à quoi de peindre aujourd’hui ?

(lire le post-scriptum pour ceux qui ont lu l'article avant la critique de "Matthias le Peintre").

Une question de tous les temps : « ça sert à quoi de peindre aujourd’hui ? » Pourquoi peindre ? Que fait-on lorsque nous peignons ? Y a-t-il exorcisme ? De quoi ?

La peinture apporte-t-elle des réponses à l’existence ? Nous dit-elle « E » (epsilon) : « Tu es » ? ou comme à l’entrée de Delphes : « Connais-toi toi-même ? ».

Cette question de la peinture est redondante. Matthias Grünewald, le peintre du Retable d’Issenheim, se la pose comme tout peintre qui réfléchit à son art. Mais la question n’a pas de réponse.

Et pourtant, je, tu, il peins (t). La couleur s’étale ; j’ai envie que ce soit beau et le plus souvent je suis déçu. Et pourtant, quand je porte mon dessin à maman que me dit-elle ? « C’est beau » !

Par ces mots, elle me ravit. Elle m’apprend « le Beau », me l’inculque malgré elle, fait que toute ma vie je cherche « le Beau ». Toujours me trompant sans doute, mais toujours essayant.

Comme lorsqu’elle dit à son enfant qu’il est beau. C’est quoi le « Beau ». C’est quoi ce que cherche maman dans son enfant, dans un dessin, des gribouillages, des coulures plus ou moins bien étalées sur un papier ?

Quelqu’un me dira-t-il encore la Beauté ? En suis-je encore capable ? Le défi n’est-il pas insurmontable ?

Et puis quand on regarde autour de soi. Toute cette violence, ce monde insatisfait qui se défait, cette lutte sans merci pour survivre, trouver sa place, la conserver. Cette négligence !

Alors la peinture oui, la peinture encore et toujours. Retourner à la table. Tourner le dos à la classe. Prendre son pinceau, ses couleurs et sans frein que soi-même se lancer. Il y a des risques c’est vrai que ce soit laid. Qu’il faille froisser le papier, abandonner une œuvre imparfaite.

Et pourtant E (epsilon) existe par ce geste ; E se confronte à soi-même ; propose par ce geste même une autre Geste.

Un autre monde existe, à portée de tous ; là, il suffit de regarder, de porter son œil sur les êtres et les choses. Découvrir et redécouvrir l’infini des possibles pour chacun d’entre nous. Sans doute ce qui fait Courbet appeler son paysage de mer à Palavas : « Marée basse, soleil couchant (Immensité) ».

La parenthèse est l’E de la dénomination du tableau : (Immensité) ! Importance accentuée par la majuscule. Ce qui donne au tableau son sens véritable par son ambiguïté même.

Ce n’est pas la plage, ce n’est pas le ciel, c’est l’Immensité que nous peint Courbet. A portée de main, d’œil, il y a l’infini de la terre et du cosmos. Regardons-le.

Dans le Retable d’Issenheim, Grünewald nous dit la même chose : il y a l’immense douleur des guerres et des hommes, mais qu’est-elle à côté du Sacrifice du Fils de Dieu pour nous ? Immensité du Sacrifice qui dépasse l’immensité de la douleur.

Le Sauveur n’a-t-il pas été sacrifié sur le Golgotha, là où fut enterré le Premier Homme ? Le premier Pêcheur !

PS : Je suis allé voir l’Opéra de Paul Hindemith « Mathis der Maler ». Ce n’est pas un bon opéra. La trame en est confuse ; l’histoire complexe est très difficile à mettre en scène. C’est une narration découpée en parties quasi étanches les unes avec les autres ce qui enlève toute cohérence à l’ensemble.

De ce fait, il est très difficile de suivre le spectacle ; la musique est contrariée par une mise en scène absconse qui happe notre concentration sans nous donner les clés du fonctionnement de l’opéra et de la scène. Ce qui rend l’ensemble illisible.

Les Sept Tableaux de l’opéra sont d’une esthétique douteuse. La critique et la présentation du spectacle insiste sur le parallèle entre la situation au temps de la Guerre des Paysans et la montée d’Hitler au pouvoir. Mais fallait-il à ce point, insister sur cette ressemblance ?

Hindemith la souhaitait-elle ? N’est-ce pas plutôt un artefact contemporain fait de contrition et de repentance ? Le char, les troupes bolchévisées, la Nuit de Cristal, le Christ culotté, le retable désacralisé : tout est lourd, vulgaire et confus. Comme l’époque sans doute ! La nôtre !

Mais ça ne crée nulle émotion, tue l’intérêt et on quitte l’opéra en se demandant ce qu’on est venu y faire.

Mauresk.

Ça sert à quoi de peindre aujourd’hui ?

Une question de tous les temps : « ça sert à quoi de peindre aujourd’hui ? » Pourquoi peindre ? Que fait-on lorsque nous peignons ? Y a-t-il exorcisme ? De quoi ?

La peinture apporte-t-elle des réponses à l’existence ? Nous dit-elle « E » (epsilon) : « Tu es » ? ou comme à l’entrée de Delphes : « Connais-toi toi-même ? ».

Cette question de la peinture est redondante. Matthias Grünewald, le peintre du Retable d’Issenheim, se la pose comme tout peintre qui réfléchit à son art. Mais la question n’a pas de réponse.

Et pourtant, je, tu, il peins (t). La couleur s’étale ; j’ai envie que ce soit beau et le plus souvent je suis déçu. Et pourtant, quand je porte mon dessin à maman que me dit-elle ? « C’est beau » !

Par ces mots, elle me ravit. Elle m’apprend « le Beau », me l’inculque malgré elle, fait que toute ma vie je cherche « le Beau ». Toujours me trompant sans doute, mais toujours essayant.

Comme lorsqu’elle dit à son enfant qu’il est beau. C’est quoi le « Beau ». C’est quoi ce que cherche maman dans son enfant, dans un dessin, des gribouillages, des coulures plus ou moins bien étalées sur un papier ?

Quelqu’un me dira-t-il encore la Beauté ? En suis-je encore capable ? Le défi n’est-il pas insurmontable ?

Et puis quand on regarde autour de soi. Toute cette violence, ce monde insatisfait qui se défait, cette lutte sans merci pour survivre, trouver sa place, la conserver. Cette négligence !

Alors la peinture oui, la peinture encore et toujours. Retourner à la table. Tourner le dos à la classe. Prendre son pinceau, ses couleurs et sans frein que soi-même se lancer. Il y a des risques c’est vrai que ce soit laid. Qu’il faille froisser le papier, abandonner une œuvre imparfaite.

Et pourtant E (epsilon) existe par ce geste ; E se confronte à soi-même ; propose par ce geste même une autre Geste.

Un autre monde existe, à portée de tous ; là, il suffit de regarder, de porter son œil sur les êtres et les choses. Découvrir et redécouvrir l’infini des possibles pour chacun d’entre nous. Sans doute ce qui fait Courbet appeler son paysage de mer à Palavas : « Marée basse, soleil couchant (Immensité) ».

La parenthèse est l’E de la dénomination du tableau : (Immensité) ! Importance accentuée par la majuscule. Ce qui donne au tableau son sens véritable par son ambiguïté même.

Ce n’est pas la plage, ce n’est pas le ciel, c’est l’Immensité que nous peint Courbet. A portée de main, d’œil, il y a l’infini de la terre et du cosmos. Regardons-le.

Dans le Retable d’Issenheim, Grünewald nous dit la même chose : il y a l’immense douleur des guerres et des hommes, mais qu’est-elle à côté du Sacrifice du Fils de Dieu pour nous ? Immensité du Sacrifice qui dépasse l’immensité de la douleur.

Le Sauveur n’a-t-il pas été sacrifié sur le Golgotha, là où fut enterré le Premier Homme ? Le premier Pêcheur !

PS : Je suis allé voir l’Opéra de Paul Hindemith « Mathis der Maler ». Ce n’est pas un bon opéra. La trame en est confuse ; l’histoire complexe est très difficile à mettre en scène. C’est une narration découpée en parties quasi étanches les unes avec les autres ce qui enlève toute cohérence à l’ensemble.

De ce fait, il est très difficile de suivre le spectacle ; la musique est contrariée par une mise en scène absconse qui happe notre concentration sans nous donner les clés du fonctionnement de l’opéra et de la scène. Ce qui rend l’ensemble illisible.

Les Sept Tableaux de l’opéra sont d’une esthétique douteuse. La critique et la présentation du spectacle insiste sur le parallèle entre la situation au temps de la Guerre des Paysans et la montée d’Hitler au pouvoir. Mais fallait-il à ce point, insister sur cette ressemblance ?

Hindemith la souhaitait-elle ? N’est-ce pas plutôt un artefact contemporain fait de contrition et de repentance ? Le char, les troupes bolchévisées, la Nuit de Cristal, le Christ culotté, le retable désacralisé : tout est lourd, vulgaire et confus. Comme l’époque sans doute ! La nôtre !

Mais ça ne crée nulle émotion, tue l’intérêt et on quitte l’opéra en se demandant ce qu’on est venu y faire.

Mauresk.